Une Semaine, un Chapitre

Mais on ne distance pas Marcel comme ça. Johanna le comprit, à ses dépends, car sept fois, le même manège se répéta, jusqu’à ce que John Bonhomme trouve en Marcel un acolyte de choix, un partenaire primordial, une esquisse de son génie, un simple trait de commencement de lui-même, non abouti encore, mais empli d’espérance.
- Ce jeune homme, dit John, ira loin.

- C’est bien normal, répond Timéon, puisque c’est le mien ! (Et il pense, en son for intérieur, que Johanna est bien bête, et que cela est plus que normal, puisque c’est une fille).
- Mademoiselle, Monsieur, dit Siméon en s’inclinant, je suis bien heureux, ma foi, de rencontrer la famille de John bien qu’il ne s’en souvienne pas du tout. Je l’ai recueilli presque enfant, que l’on pourrait dire, car l’enfant n’est-il pas celui qui n’a pas encore d’histoire ?

Il est assez difficile d’imaginer ou même de conter la scène qui suit. Comment, sans paraitre insensé, raconter la première leçon de surf d’un cow-boy avec pour toute planche son cheval ?

Que les lecteurs ne s'effraient pas: pendant un mois, John Bonhomme a été bien malade. C'est bien simple, il ne voulait ni marcher, ni monter à cheval. Il faisait la grève de l'aventure et tout eut été bien plus terrible s'il n'avait fait un rêve et dans ce rêve, Ernest Corqueweste prenait sa place de héros légendaire...

Johanna, elle est restée dans la forêt. Pas qu’elle en ait fondamentalement envie, mais sans cheval, sortir de ce labyrinthe bleuté n’est pas sans complexité. Elle a d’abord marché, seule, en pestant contre son imbécile de père qui, courant après un quelconque fantôme l’a abandonnée sans même revenir. Elle a faim. Elle mange des feuilles.