Tout commence avec Jerry qui, persuadé que la centrale électrique bousille sa matière grise, décide, une nuit, après avoir convaincu son ami Mike, de la détruire. Jerry devient caméléon, puis viande à barbecue, quelques secondes, le temps de dizaines de décharges. Un personnage radioactif, donc, qui insiste bien sur le fait qu’il n’est que magnétisé et efface toutes les cassettes. Panique. Les clients veulent louer. Le magasin d’à coté a troqué les cassettes contre les DVD. Malheur. Quelques heures. Et Jerry qui s’est enduit d’aluminium, comme si, déjà, il avait anticipé les prochaines heures. Car Mike a un caméscope, et donc une solution. Refaire les films, en tenant compte de la seule chose qui reste : la pochette ! S’ensuit une première expérience : Ghostbusters vu par deux amis, sans aucun moyen financier et avec quelques heures devant eux. Les clients qui en redemandent. La fabrique est lancée : de Robocop à Rush Hour 2, en passant par 2001 L’Odyssée de l’espace, ou encore le roi Lion, les deux amis réécrivent peu à peu l’ensemble des films du vidéo club, dans un style parodique et décalé. Le film, sous ses airs déjantés, rend hommage à ces films faits mains, sans budget, dans un format vhs aujourd’hui disparu.

La bande annonce laissait présager un excès : l’omniprésence et la lourdeur de Jack Black (Jerry). Be Kind Rewind échappe à l’écueil sans difficultés aucune, et mieux encore, utilise cet élément dans la dualité du binôme Mike-Jerry, ce dernier étant plusieurs fois remis à sa place par son ami.

Les remakes dits sueded (suédois, parce que la Suède, c’est loin), s’enchainent à un rythme effréné mais Michel Gondry aurait peut-être gagné à s’appesantir plus longuement sur certains. Un genre manque aussi à l’appel : un remake de Nosferatu le vampire ou La Nuit des morts vivants aurait pu être savoureux.

Une idée fantastique, donc, dont le peu de moyens n’est absolument pas dérangeant, mais au contraire nécessaire, avec, pour le spectateur, un seul regret peut-être : la durée du film, un peu court comparé aux multiples possibilités que le scénario, très ouvert, offrait.

Restent des moments d’anthologie : la pizza pour représenter le sang, l’univers blanc et circulaire de 2001, cet enfant de dix ans qui joue Fat’s Waller, dont l’actrice accouche dans l’extase ! Michel Gondry, par l’intermédiaire de ses deux personnages, s’immisce en effet dans un faux documentaire pourtant criant de vérité sur l’existence de Fats Waller qui serait né dans l’immeuble du vidéoclub. Un quartier entier se lance dans l’aventure d’un tournage qui défie les lois du réel, en espérant sauver le vidéoclub menacé de démolition. Parce qu’un film drôle, peut être aussi émouvant. La projection du travail de toute la communauté, à la fin du film, jouant le jeu du pile et du face, comme il en avait déjà été question dans la mise en garde que M. Fletcher avait écrit sur la vitre du train (Keep Jerry out), qui donnait, pour Mike de l’autre coté, une langue inconnue, réconcilie extérieur et intérieur dans un dénouement où l’émotion, timidement, prend le pas sur le rire. Be kind, see it.