Même constat pour la couleur : Rec, de Paco Plaza, fait le choix d’une combinaison originale dans un film où les morts vivants sont des vieilles dames, des enfants, ou des pompiers. La Nuit des morts vivants sommeille dans un coin de l’immeuble : dans ce huis clos oppressant, les innocents et les faibles sont les plus dangereux.

La caméra, tenue par l’assistant d’Angela, n’est pas la bienvenue : elle est coupée, frappée, comme pour rappeler la forme d’irrespect qui plane sur le choix de filmer la mort et la peur. Les institutions à l’extérieur n’ont pas un meilleur rôle : on ne verra rentrer qu’un seul médecin, caparaçonné comme pour partir dans l’espace, et quelques expressions lancées au micro (« désolée pour la gêne occasionnée »). Car Rec fait preuve de réalisme : le terme de morts vivants n’est jamais prononcé, le filmage à l’épaule, au plus près, documentaire, donne l’impression d’être devant un fait réel, et proche : la contamination se déroule dans un immeuble, en plein centre ville. Pour les institutions, il s’agit d’une menace biologique.
Alors le film fait peur. Ces personnes soignées ne vont-elles pas, après tout, se transformer elles aussi ? Toutes les issues ne sont-elles pas bouclées par la police ? Comme pour La Nuit des morts vivants, les héros ne peuvent compter que sur eux-mêmes, espérance bien maigre, quand même le pistolet du policier enfermé avec les habitants ne suffit pas à tuer ces hommes et ces femmes devenus cannibales.

Seule la fin déçoit, car pourquoi vouloir expliquer ce qui prend l’allure d’un fait divers et pourrait s’étendre à une menace potentielle pour toute la ville, en montrant des murs remplis d’articles de journaux ? Expliquer la raison d’un tel bain de sang, c’est toujours risquer un affaiblissement de l’horreur, une déception du côté du spectateur dans la tentative de rationaliser les faits. Mais les images restent intenses et terribles jusqu’au bout, jetant le spectateur hors de toute espérance. Rec est un film obscur, qui traite autant de l’inhumanité des personnes contaminées que des autres : racisme envers le couple chinois, suspicion et sacrifices perpétuels, indifférence des secours. L’homme est un être de violence, d’abord verbale, puis cannibale.

Petite info supplémentaire : un remake américain est prévu. Sortie le 31 décembre 2008, sous le doux nom de Quarantine… Hollywood ne perd pas de temps. Espérons que Jennifer Carpenter saura donner à son personnage toute l’action et le dégoût nécessaire au rôle. Du côté de Manuela Velasco, l’actrice espagnole, c’est fait, et bien.