Le prix d’interprétation, remis à Charlotte Gainsbourg, durant le festival de Cannes est plus que mérité : son jeu, à la fois émouvant et bestial, repose sur un physique sans cesse mis à nu, qui laisse imaginer un tournage pour le moins éprouvant.

Un couple (Charlotte Gainsbourg et Willem Dafoe) vient de perdre son petit garçon, tombé au bas de l’immeuble après avoir escaladé une fenêtre. Le couple, environ un mois plus tard, décide d’aller vivre dans leur chalet en forêt d’Eden pour combattre les vieux démons et ressouder leur couple. C’est l’histoire d’Antichrist : un fil narratif simple, ténu.

L’esthétique du film s’affiche dès le départ comme expérimentale : noir et blanc dans le prologue et l’épilogue, usage démultiplié du ralenti et du flou, jusqu’à saturation.
Certes, Lars Von Trier fait d’Antichrist un film hypnotique, où la texture des corps rencontre la texture des images, inoubliable.
Mais dans cette histoire cauchemardesque, certains effets sont utilisés sans nuances. La bande son, digne d’un film d’horreur ne fait pas dans la demi-mesure, et au bout d’une heure de film, le retour de lourds battements, ou les nombreuses chutes de dizaines de glands achèvent de faire d’Antichrist un film lourd, que peu de spectateurs souhaiteront porter.
La lourdeur, le personnage qu'incarne Willem Dafoe ne s’en défait pas, sorte de psychologue aux exercices ridicules et aux phrases plutôt pompeuses.

Deux thèmes rejoignent la violence en marche : la nature, méchante et mauvaise, et une thèse pas terminée sur les génocydes des femmes au XVIème siècle. Et finalement, le film Antichrist ne serait qu’une mise en pratique des textes lus par la femme pendant sa thèse : la femme mauvaise et malsaine qui a bien mérité d’être châtiée. Plutôt incompréhensible.
Les hallucinations animales dont est victime le mari le sont tout autant, hallucinations qui – on le comprend à la fin- avaient sans doute pour fonction de mettre en garde le pauvre mari, décidemment risible.

Le dernier tiers du film s’avère tout simplement insupportable : une violence brutale que les multiples effets de caméras ne peuvent plus embellir. Le spectateur est mal à l’aise. Les images sont malsaines. Les rares spectateurs s’éclipsent, peu à peu.
Avec Antichrist, Lars Von Trier a dépassé l’intéressant décalage entre souffrance d’une histoire et beauté des images, en s’enfonçant dans la forêt la plus terrifiante qui soit : l’intériorité humaine, satanique et irraisonnée.

Film écrit pendant la dépression de son réalisateur, Antichrist est une condensation de douleur, de souffrance et de violence, qui ne sait qu’effectuer une boucle épique et musicale sur lui-même.


Note : /
Un film impossible à noter, à conseiller aux spectateurs qui ne connaissent pas encore leurs limites dans leur confrontation avec le malsain et le malaise.
Une expérience à tenter, pour un nombre limité d’avertis. Difficile de prendre un quelconque plaisir devant Antichrist et force est de constater que si certaines personnes partaient pendant la séance, j’ai résisté pour ne pas les suivre.
Dans le noir, on part à la recherche de sa montre : combien de temps encore supporter cette horreur, barbante en plus ?

Strabz, peut-être peux-tu tenter l’aventure… Alone !


Bande annonce du film Antichrist de Lars Von Trier.
Acteurs :
Charlotte Gainsbourg
Willem Dafoe