Jeanne, mère de deux enfants, se voit essuyer un refus de la maison d’édition Hachette qui n’aime pas son roman consacré à l’enfance. Troublée, déçue, la jeune femme tente de justifier son livre et son thème : elle a besoin de parler de l’enfance, parce qu’elle n’en a pas eu. La belle Jeanne n’a aucun souvenir avant ses huit ans, touchée enfant par une amnésie.

Les premières images du film ne le mettent pas en valeur. Le jeu des reflets (tuyaux d’argent et miroirs de la salle de bain) montrent un personnage déjà tronqué, désuni. Jeanne est multiple : ses jambes appartiennent au miroir du bas, son front au miroir du haut, son buste à la pomme de la douche.
La mise en scène consacrée au reflet est trop appuyée, comme si Marina de Van cherchait à asséner au spectateur la condition psychologique fragile de son personnage, qui ne sait ensuite que souffler, sans un mot. Il y a mieux pour plonger le spectateur dans une histoire.

Difficile donc de ne pas passer à coté : Jeanne va mal. Chaque plan le suggère… Mais l’idée est bonne, diabolique. Jeanne perd pied, peu à peu : elle ne reconnaît plus son appartement, ni ses enfants, et plus intriguant encore, elle ne se reconnaît plus. Et nous aussi, on se perd : les enfants, le mari, changent physiquement (Téo est joué successivement par Andrea Di Stephano et Thierry Neuvic) et cerise sur le gâteau la belle Jeanne, jouée par Sophie Marceau, se transforme peu à peu en Monica Bellucci !

Ne te retourne pas joue sur les séquences de morphing, à la fois drôles et effrayantes.
Le milieu du film, qui propose les deux visages en un (moitié Sophie Marceau, moitié Monica Belluci) font rire pour l’asymétrie comique du visage exploité en gros plan lors de discussions très sérieuses. Et en même temps, comment ne pas être effrayé par la difformité qu’entrainent deux des plus belles actrices sur le visage de Jeanne ? Deux beautés créent la laideur. Le malaise. Le frisson.

Perdre le spectateur, Ne te retourne pas le fait avec virtuosité. En esprit. A Paris. A Lecce, ville italienne aux rues plus étroites. L’intrigue se resserre, jusqu’à un dénouement quand même invraisemblable mais dont le twist ending en ravira plus d’un.


Note : Ne te retourne pas, 7,5/10
Une mise en scène réflexive trop appuyée pour un thriller sur l’enfance à l’idée originale.
La scène dansée est l’une de mes favorites : comme dans Le bal de l’horreur (Prom Night) de Paul Lynch, l’intrigue s’arrête soudainement, pendant plusieurs minutes. Jeanne (Monica Bellucci) danse, tournoie, se libère.


Bande Annonce Ne te retourne pas