Comme à leur habitude, les frères Coen déjouent habilement les beautés des visages : George Clooney, barbu et coureur de jupon, n’est pas séduisant pour un sou, pas plus que John Malkovitch dont le crane chauve n’a jamais été aussi voyant, et les scènes en caleçon relativement décalées par rapport à ses rôles habituels d’élégance culturelle. Brad Pitt passe par la même boite à métamorphoses : le voilà doté d’une banane avec une mèche plus blonde que blonde, et prof de sport, constamment suspendu à son Ipod. Mais pourtant, Brad Pitt reste beau. Attachant, aussi, contrairement aux personnages qu’incarnent John Malkovitch et George Clooney. Voilà le personnage le plus réussi, et pourtant le plus résistant à ces transformations monstrueuses déjà opérées dans No country for old men avec un Javier Bardem méconnaissable.

Le rôle de Brad Pitt, niais et pas très fute fute, condense à lui seul les scènes les plus drôles du film. C’est son personnage : Chad, qui lit sur son ordinateur le cd trouvé par l'un des employés, un cd rempli de données secrètes et sensibles, de la plus haute importance ! Alors pourquoi pas faire chanter la personne qui a perdu le fameux disque, et empocher l’argent, divisé en deux car Linda, une collègue de la salle de sport, est au courant, et cherche à tout prix un financement pour ses liftings et autres opérations chirurgicales. C’est Chad qui s’y colle pour contacter le haut dignitaire qui a perdu les infos : Osbourne Cox (John Malkovitch). Là se tient la scène la plus drôle du film, Chad répétant à chaque fin de phrase "Osbourne Cox", prenant une voix mystérieuse, et ne comprenant pas grand chose à la hargne de son interlocuteur au bout du fil ! Chad et Brad Pitt sont le rayon de soleil de Burn after Reading.

Car, le nouveau film des frères Coen, pâtit d’un manque de rythme certain : des dialogues s’éternisent, et au bout du compte, il ne se passe pas grand chose… Difficile de comprendre vraiment où veulent en venir les frères Coen. De qui se moquent-ils ? Du cinéma hollywoodien ? Des spectateurs ? D’eux-mêmes ? Le titre, Burn after reading, n’est-il pas le signe d’une grosse farce dont on profite une fois, pour s’en débarrasser ensuite ? Le film, aujourd’hui, est-il un matériau recyclable ou tout juste bon à jeter dès qu’on en a profité ?
Burn after Reading est un film décalé, qui ne fait aucun cadeau aux personnages les plus normaux ou les plus niais : les coups de feu qui partent sont à chaque fois inattendus, et le public, comme la CIA, ne comprend pas vraiment l’affaire, à l’image des discussions entre le chef et son collègue au rapport qui relate meurtres et fuites sans cerner la logique de l’ensemble. Finalement, la CIA, les détectives, c’est un peu nous, spectateurs, avides d’observer, de regarder, bien au chaud sur notre siège, et pas toujours avec la clé de l’énigme en poche.


Note : 6/10
Le parti-pris loufoque et cocasse de Burn after Reading annule toute tension. On s'ennuie un peu lors de certaines scènes. Mais, reste la facilité avec laquelle les frères Coen métamorphosent des acteurs parfaits en personnages crétins ou monstrueux.