Depuis vendredi, l’université de Nanterre est bloquée, comme quelques autres. Etant en Master 1, j’ai déjà connu le CPE et son mois de grève si injuste et frustrant. Pris en otage il y a déjà deux ans, il semblerait que nous, malchanceux étudiants de Nanterre, malchanceux étudiants de nombreuses universités, soyons contraints de regarder sous nos yeux la liberté d’étudier s’envoler. Pourquoi ?

Parce qu’une partie infime des étudiants se lèvent tôt le matin pour bloquer nos bâtiments en clamant haut et fort que l’action est fort démocratique puisque l’assemblée générale, souveraine, a voté en majorité pour l’arrêt des cours. Parlons un peu démocratie : moins de 1000 personnes lors de cette assemblée pour une fac de plus de trente mille étudiants ! Encore plus absurde : un article dans le monde spécifie qu’un tiers des étudiants présents à l’AG de l’université de Nanterre n’appartenaient pas à l’université ! En région parisienne, constate le président de Nanterre, une centaine d'individus, issus des groupes comme la CNT, SUD-Etudiants ou la LCR, se déplacent de fac en fac. Le 8 novembre, comme le site de Tolbiac de Paris-I était fermé, ils sont venus à Nanterre explique l’article. Révoltant non ?

Mais amusons-nous encore un peu… La loi contre l’autonomie des universités est votée pendant les vacances d’été… Manifester pendant les vacances ! Non, ça va pas la tête… Il faut attendre la rentrée, les cours, c’est bien plus intéressant. Septembre alors ? Mais non, les cours n’ont pas repris encore, c’est idiot. Octobre ? L’idée est moyenne: des grèves des transports sont prévues le mois prochain alors autant s’y greffer, c’est bien plus judicieux. Alors on me dit que le mouvement ne commence vraiment maintenant que parce qu’il a fallu du temps pour avertir les étudiants ! Mensonge. Le choix n’est dicté que par la lâcheté et le désir de se venger d’un président qui a été élu, d’un gouvernement qui agit. Les bloqueurs ne sont que de pauvres moutons noirs, et s’ils devenaient panurges, j’avoue que tout ceci m’arrangerait bien. Hélas, l’université de Nanterre et les universités en général sont peu enclavées. Sans doute alors, faudrait-il proposer une AG à la montagne histoire de s’en sortir.

Petit instant pathétique maintenant ou comment légitimer le blocage ? Alors là, les quelques étudiants montrent un dévouement extrême : ils pensent aux boursiers qui sont obligés d’aller en cours pour conserver leur bourse. Alors sans blocage, pas de manifestation pour ces étudiants là. Mauvaise foi là encore : bloqueurs, vous bloquez avant tout pour vous-mêmes… Même si aller en cours ça vous fait chier, rater les cours ça vous fait chier autant. En fait tout vous faut chier finalement, à part garder des bâtiments comme des chiens de faïence ou arpenter le pavé pour vous réchauffer en criant : pas besoin de réfléchir pour tout ça, seulement de suivre, et ça a l'air de vous convenir.

Il y a la peur aussi qui vous tenaille, la peur du changement. Je l’ai aussi, mais il va falloir l’affronter. L’immobilisme tuera l’université française. Il tuera la France. Regardez-vous à l’échelle du monde : voyez tous ces chinois qui travaillent plus que nous, dont la croissance est bien meilleure, regardez l’Allemagne où les entreprises commencent à financer les universités. Il n’y a pas que la France sur terre, et pas que le passé. La contestation n’est pas dynamique. Elle est passéiste et figée. Les gouvernements essayent de régler le problème étudiant. A force de refuser ces tentatives, un jour, ces mêmes gouvernements ne s’intéresseront plus à nous, ni même aux universités. C’est là que tout sera perdu.

Alors s’il faut manifester, manifestons. Manifestons contre les manifestations. Manifestons contre les bloqueurs. Faisons entendre une voix qui est majoritaire mais qui se terre encore en espérant se protéger ainsi de la bêtise de quelques uns qui préfèrent le devant de la scène.