C’est la pauvre Christine (Alison Lohman, qui si on ne l’a pas doublée pour les cascades a dû trouver le tournage épuisant) qui va essuyer les foudres d’un scénario rocambolesquement horrifique.
Tout commence dans une banque, où Christine refuse un prêt (et non pas un pré, comme écrit initialement) à une vieille dame malade au fort accent étranger, suintant littéralement de part en part (nez qui ne cesse de couler, des dentiers qu’elle expose sur la table, et une batterie de doigts crochus qu’on imagine infestés de microbes, sans oublier l’œil en verre poli). La vieille femme crie vengeance et s’attaque le soir même à la pauvre Christine venue chercher sa voiture dans un parking. La scène est croustillante, effrayante à souhait (mention spéciale à l’apparition surprise de la vieille dame dans la voiture) et inattendue tant les deux femmes se battent comme des chiffonnières.
Christine s’en sort avec des égratignures et un bouton de manche arraché, sans compter une malédiction. Selon le nécromancien qu’elle consulte, le diable Lami la tourmentera trois jours avant de la trainer avec lui jusqu’en enfer.

Jusqu’en enfer est un film en dents de scie : une alternance entre les tortures qu’inflige le Lami, filmées avec de nombreux plans bancals très efficaces et les sensations de Christine qui se croit ensuite systématiquement sauvée. Le film surfe entre l’humour et l’ironie, intronisant par exemple Christine – et en même temps sa nervosité face aux événements récents - aux parents de son petit ami Clay (Justin Long, déjà remarqué dans He is just not that into you). Le saignement de nez digne du Kill Bill de Tarantino et orienté en direction du directeur de la banque est drolatique à souhait : voilà le spectateur devant une gentille jeune femme maudite avec laquelle on a peur, mais dont on rit aussi.

Si Sam Raimi prend tant de libertés visuelles avec le genre, c’est parce qu’il a avec lui une armada de thèmes musicaux dignes des plus grands films d’horreur (Jusqu’en enfer est même composé d’un morceau qui n’avait finalement pas été utilisé pour L’Exorciste). Ce décalage entre son et image, esthétiquement jouissif, est sans doute la plus grande force du film.

A regretter cependant, un dénouement qui fait le choix du visuel en montrant quelques secondes le Lami… Pas franchement convaincant, mais impossible à reprocher si l’on considère que Jusqu’en enfer prend jusqu’au bout le parti de rire des films de possession. Il n’empêche : on serait bien allé à Santa Barbara voir ce que le Lami aurait bien pu trouver comme idée pour effrayer sa victime sur la plage !

Note, Jusqu'en enfer : 8,5/10
Sam Raimi réussit à faire d’une vieille dame tsigane un monstre plus effrayant que le Lami lui-même et ce dans une ambiance mi ironique, mi horrifique.
Le film Jusqu'en enfer est à conseiller pour les fans du genre, et les fans du célèbre Une nuit en enfer de Robert Rodriguez (et avec Tarantino comme acteur), au titre d’ailleurs très similaire…


Petite note personnelle : Pour faciliter l’identification aux personnages et l’immersion dans l’histoire (et ce dans ¾ des films américains), je conseille de passer quelques mois à Los Angeles.
Quel bonheur, dans Jusqu’en Enfer, de voir quelques images de Union Station avec un personnage qui porte ses valises au même endroit où j’ai porté les miennes ! ça change un film je vous dis !