Rabbit Proof Fence, de Philipp Noyce, est sans aucun doute un film émouvant, très émouvant, mais facilement: prenez trois sœurs métisses qu'on enlève à leur mère pour les déporter dans un camp pauvre et sévère aux allures de prison, et à des centaines de kilomètres de leur lieu d'origine.
Ajoutez à ce bon début un homme implacable, intransigeant, absolument détestable, qui s'occupe de cette politique de déplacement...
Puis, les fillettes s'échappent, et marchent, marchent, marchent, pour retrouver leur mère, retrouver leur village.
Le périple ne les effraie pas, au contraire, et ces trois enfants chétives ne manquent jamais d’ingéniosité : elles sèment un aborigène embauché pour les retrouver, la barrière construite pour arrêter les lapins leur permet de s’orienter, belle ironie du sort.
Pas d’hésitation sur les sentiments à éprouver, aucune trace d’une possible ambigüité: le spectateur est sur une autoroute, ou en tout cas, lui aussi longe la fameuse barrière.

Le film choisit, sans hésiter, la facilité, mais qui a dit que la facilité était sans intérêt ? Qui a dit que le manichéisme n'était jamais un bon choix esthétique, ou encore scénaristique ?
Les atouts du film sont indiscutables: trois jeunes actrices étonnantes et émouvantes, des paysages magnifiques, et la volonté d'insérer dans la filmographie australienne la vérité sur les traitements infligés aux aborigènes.
Car il s'agit d'une histoire vraie: Molly, Daisy et Gracie ont bel et bien existé.

La facilité, le manichéisme, prennent alors une signification bien plus profonde et sérieuse : il s'agit de raconter, simplement, sans chercher d'excuse au comportement de ses ancêtres et en accentuant même, peut-être, leur manque d'humanité.

Une route vers la délivrance, en somme, qui achève de lier les trois fillettes au spectateur : chacun découvre un chemin rectiligne mais difficile ; l’épopée parallèle se construit, jusqu’à la dernière seconde.