La première scène offre une tension palpable et magnifiquement distillée : en plein centre de New York, dans un parc, les gens s’arrêtent et se suicident, sans aucune raison. Dans la ville, le même scénario se multiplie si bien que les autorités invitent les habitants de la cote est à fuir. Elliot et sa femme Alma, accompagnés de Jess, son père, et encore d’autres, exécutent l’ordre, perdant peu à peu les leurs en chemin.
Le fléau laisse place à des scènes surprenantes et originales, comme ces ouvriers qui plongent dans le vide ou encore ces gros plans sur les pieds de personnages qui, chacun leur tour, empoignent le pistolet du policier qui vient de se tuer pour se tuer eux aussi. Le hors-champ est le maitre dans un film qui repousse sans cesse le gore, jusqu’à le compiler dans une vidéo d’I Phone (quel dommage que cette publicité qui n'apporte évidemment rien au film !) où un homme se fait déchiqueter les bras par des lions.
L’idée de départ est bonne : les plantes produiraient des toxines pour tuer les hommes, parce qu’elles se sentent menacées par lui. De quoi regarder différemment le coup de vent du matin ou sa pelouse peut-être un peu trop puissante. Les multiples références à La Nuit des morts vivants de Romero sont croustillantes : Shyamalan reprend l’écran de télévision et la radio au sein du film, et tous ces experts qui cherchent des solutions semblent infiniment loin de la réalité, infiniment illusoires et absents. A l’image, le film le montre bien, il n’y a pas de solution verbale, ou scientifique, et c’est ce mystère là qui permet le malaise.
La fin de Phénomènes perd hélas en épaisseur : Night Shyamalan propose deux dénouements en un, allant chercher à Paris un sursaut d’irrationnel, si bien qu’on peut tout de même s'interroger : Shyamalan a-t-il quelque chose contre Paris et le jardin des Tuileries ? A-t-il aussi un problème avec les acteurs français (dire je vais faire la fête et je vais aller chercher mon vélo, c’est quand même bien caricatural, et il faut voir le jeu d’acteur dans cette scène…)
A ce point là de la critique, on peut même aller jusqu’à dire, sans avoir honte, qu’on est bien étonné de l’affiche du film, puisqu’elle ne rappelle aucun moment du film : le couple dans la ville sans vie ne fait pas partie de l’histoire… Il se retrouve, au contraire, à la campagne ! J’en profite pour formuler plus simplement le conseil de Night Shyamalan pour survivre en milieu dangereux : gagner la campagne au plus vite, sans pour autant ignorer la menace et surtout, s’aimer !
Reste que Phénomènes ne fait pas peur, pas plus qu’il ne fait pleurer, un problème certain quand on se souvient que voir un film, c’est partir à la recherche de ses propres émotions. Une seule chose effrayante, à mon sens : c’est cette mère de Jess qui restera un fantôme durant tout le film, dont on ne saura rien, qu’on ne verra jamais. Le paroxysme du hors-champ maximum effraie, bien plus qu’un pauvre homme qui se jette sous les roues d’une tondeuse à gazon…
18
juin
Phénomènes, le nouveau film de Night Shyamalan
Par Ariane le mercredi, juin 18 2008, 19:37 - Films à l'affiche
En allant voir Phénomènes, le spectateur s’attend à un nouveau film fantastique dans la lignée de Sixième sens, Le Village et La Jeune fille de l’eau. Mais c’est plutôt d’un film catastrophe, voire d’un mélodrame, qu’il s’agit.
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5.8/10
- Note : 5.8
- Votes : 29
- Plus haute : 10
- Plus basse : 1
Commentaires
Ah je voulais le voir ce film. Puis, quand j'ai vu la bande annonce, je me suis dit que non. J'aurais été trop déçue, en sortant du ciné, de voir que les gens chiants dans les rues de Paris ne mettent pas fin à leur jour...
Ce qui est dommage, après un début excellent, c'est l'essouflement presque immediat qui frappe le film après... Les seuls moments "marrant" étant de se demander comment un tel ou un tel va se suicider (avec de la redondance en plus, cf. pistolet flic puis soldat)
Je passe sur la fin, un grand moment de rattache complet. Néanmoins, ça fait réfléchir
Voyons... "Sixième sens" est un chef d'oeuvre... "Incassable" est passionnant... "Signes" est plein de séquences magiques... "Le Village" est beau et bâti comme un conte de fées des frères Grimm... "La jeune fille de l'eau" est une sacrée daube (comment a-t-il pu être aussi aveugle sur ce "coup" ? A mon avis, l'était amoureux d' son actrice...)... et "Phénomènes" aurait des scènes extraordinaires et une fin bâclée... il semble que parfois Shyamalan ait PARFOIS des problèmes de scénario (totalement idiot du cinquième film)... et d'acteurs (lui-même était nul dans "la jeune fille...). A part ça, Shyamalan est un génie et INVENTE le cinéma à chaque plan de ses quatre premiers films... Grand merci de ce bel article, chère Ariana !
Ginette, j'adore ton humour La fin du film t'aurait d'ailleurs beaucoup plus puisque Shyamalan choisit de s'attaquer à Paris après New York.
Eleken, il est vrai que la scène d'ouverture est excellente, j'ai beaucoup aimé aussi celle des gros plans sur les chaussures et des hommes "volants" mais ensuite, les suicides sont bien moins surprenants, moins effrayants, et c'est sans doute dû au filmage. Exemple: le suicide à la tondeuse à gazon... Pourquoi le montrer? Dans ce genre de cas, la suggestion est le meilleur moyen de faire peur, tant la scène est saugrenue... Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est un ratage complet: j'ai regardé le film jusqu'au bout s'en m'embêter, mais par contre, à partir du moment où ils découvrent la vieille femme isolée, le film s'enlise dans une tentative d'effrayer à la façon de l'exorciste, et pour moi ça ne fonctionne pas.
Dourvac'h, Sixième sens est un chef d'oeuvre, je suis bien d'accord ! L'un des problèmes de Phénomènes, c'est en effet la fin, et pas que la dernière scène... Plutôt les dernières vingt minutes. Scénario à l'eau de rose et sans vraie logique, quand il était possible de continuer dans la lancée de scènes pleines de malaise et d'hésitation. Phénomènes reste un film intéressant, pourtant, avec ce vent, impalpable, qui devient la principale menace. Comme je l'ai dit dans l'article, Shyamalan réussit à faire peur avec presque rien: du vent, une femme qui n'apparait jamais, des suicides en hors-champ. C'est ce que j'ai préféré.
Pff, c'est sympa le 7ème art, seulement, il ne faut pas oublier qu'on est tous la pour éplucher le film à la fin, et la crédibilité de celui ci peut se perdre, au détriment des mois de recherches et de tournage du réalisateur. Avant de pondre ce genre de film, (fin de phrase coupé par manque d'inspiration).
Comment ce fait-ce qu'il est troisième au box office US ? Tout le reste est encore pire ?
J'aimerais émettre un point à propos de mister Shyamalan, donc j'ai une relation amour-haine.
Il est vrai que ce réalisateur est vraiment talentueux et imaginatif, ses films ayant une poésie visuelle et un rythme lent mais soutenu, en plus de montrer une réalisation souvent originale. Il aime le cinéma, çca parait et il nous le communique très, très bien. J'adore. Le gros problème réside dans ses fins et SURTOUT, son putain de concept de révélation de la fin.
Un film entièrement basé sur une fin est très, très dangereux, car si la fin ne plait pas, il y a beaucoup de chances que le reste du film meurt avec. C'est malheureusement, pour moi, le cas de Signs par exemple: autant les 3/4 du films sont d'une justesse incroyable, autant sa fin m'a totalement déçu, nous lançant un message religieux par la tête et nous montrant l'apparence de l'extra-terrestre, qui n'est vraiment pas nécessaire (comme dit Ariane, les hors-champs sont très puissants). Et je ne veux pas parler de The Village, qui par sa fin m'a de nouveau détruit ma bulle... Mais bon. Question de goût, mais je n'irai probablement pas voir Phénomène au cinosh. DVD, quand tu nous tiens.
C'est confirmé que la fin mondiale est a Paris? parce que autant non
Sinon depuis Incassable, ce mec n'a plus rien fait de bien, allé Le village peut etre (mis a part sa fin que j'ai trouvé minable), mais la il ne prend meme plus le temps de ce justifié, une excuse des plus pourris, enfin pas que ca puisse pas arrivé, mais ils nous fait tout t'un flan d'un truc qui au final n'a pas d'explication...
Autant y'avait un interet dans les autres films a essayé de deviner la fin (apres s'etre fait avoir dans 6eme Sens), autant la c'est pas la peine, au bout de 20min si tu joue pas trop au con tu trouve pourquoi.
Alors oui le film est beau, oui c'est bien réalisé, oui c'est poétique, ou l'etre humain et tout caca et son extinction sera un plus, mais non, on ne se fou pas de la gueule des spectateurs avec un final aussi moisi.
PS: j'ajouterai aussi que demande a Mark Walhberg de jouer avec une voix niaise, pour donné l'impression qu'il est posé, et calme, (ou tt ce que vous voulez), n'est pas une bonne idée !
On a l'air à peu près tous d'accord cette fois-ci: la fin de ce film est un problème... et est bien en dessous du reste du film. Elle aurait pu être à la Coen avec une fin qui se termine quand la femme et la fille sont dans la cabane, et que l'homme est dans la maison. Spectateur frustré, bien sûr, mais fin intéressante. Ou alors, arrêter le film au moment où le héros s'élance dehors sans plus craindre ni le vent ni les plantes. ça allait pas mal avec la perspective du hors champ de proposer une hors fin...